La science contre-enquête : les secrets des vrais experts (LE FIGARO)
Philippe Esperança, morpho-analyste : Le sang à la trace
«Espé» est le spécialiste français de la révélation et de l’analyse des taches de sang. A l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN) de Rosny-sous-Bois, où il est affecté au département ATO (anthropologie, thanatologie, odontologie), le chef Philippe Esperança, 38 ans, est l’expert qui a découvert la terrible vérité à l’intérieur du chalet du Grand-Bornand (Haute-Savoie) après le massacre, en avril 2003, des cinq membres de la famille Flactif (Xavier, promoteur immobilier de 41 ans, sa compagne Graziella Ortolano, 36 ans, et leurs trois enfants, âgés de 6 à 10 ans). Une affaire pour laquelle David Hotyat a été condamné le 30 juin dernier par la cour d’assises de Haute-Savoie à la réclusion criminelle à perpétuité, assortie d’une peine de sûreté de vingt-deux ans (David Hotyat a fait appel de cette condamnation).
Convoqué à la barre pour commenter ses expertises, Philippe Esperança a raconté aux assises comment les premiers experts de l’IRCGN, arrivés dans le chalet après la disparition jusqu’alors inexpliquée des Flactif, l’avaient fait appeler parce qu’ils soupçonnaient qu’«un nettoyage des lieux avait été opéré».
«A mon arrivée, dit-il, le chalet était parfaitement rangé et propre. Après que mes collègues eurent procédé à toutes les autres constatations (empreintes digitales, traces de pas, prélèvements de particules), nous avons employé le BlueStar. Dans une pièce plongée dans la pénombre, ce produit luminescent fait réagir en bleu les traces de sang, même si elles ont été lavées soigneusement.»
«Il ne m'a pas fallu longtemps, poursuit Philippe Esperança, pour avoir la certitude que le petit salon du chalet avait fait l'objet d'un nettoyage. Grâce au produit que nous avions pulvérisé, je voyais nettement les traces de sang laissées sur le sol par une éponge d'une quinzaine de centimètres de largeur.»
Convoqué à la barre pour commenter ses expertises, Philippe Esperança a raconté aux assises comment les premiers experts de l’IRCGN, arrivés dans le chalet après la disparition jusqu’alors inexpliquée des Flactif, l’avaient fait appeler parce qu’ils soupçonnaient qu’«un nettoyage des lieux avait été opéré».
«A mon arrivée, dit-il, le chalet était parfaitement rangé et propre. Après que mes collègues eurent procédé à toutes les autres constatations (empreintes digitales, traces de pas, prélèvements de particules), nous avons employé le BlueStar. Dans une pièce plongée dans la pénombre, ce produit luminescent fait réagir en bleu les traces de sang, même si elles ont été lavées soigneusement.»
Quelques semaines plus tard, à la demande du magistrat désigné pour instruire l’affaire, le chef Esperança est de retour dans le chalet du Grand-Bornand. Sa mission : révéler les traces dans toutes les pièces et procéder à leur analyse morphologique. «Au deuxième niveau de la maison, appelé ‘le gîte’, explique le gendarme, j’ai trouvé des traces de sang provenant d’une personne victime d’un coup à une hauteur inférieure au mètre. Les analyses ADN ont démontré qu’il s’agissait de Mme Ortolano. Au sol, le BlueStar mettait en évidence un nettoyage important du palier et un cheminement des traces de sang qui allait du palier à la buanderie. Dans l’escalier menant au troisième niveau, on voyait nettement, après utilisation du produit, la manipulation et la dépose de corps à cet endroit compte tenu de la quantité très importante de sang qui avait été répandue ici.»
«Au niveau trois, poursuit-il, nous avons découvert plusieurs sites de nettoyage dans le petit salon, la cuisine et la grande salle, ainsi que des actes de violence commis, pour le premier, dans le petit salon avec une arme à feu et dont l’ADN dira que c’était Xavier Flactif. Dans la cuisine et son voisinage, nous avons mis en évidence des violences commises par un coup (une première zone de sang révélée entre la table de la cuisine et le mur, et une autre entre la table de la cuisine et la table de la salle). Ces deux zones de sang correspondaient à l’ADN de l’une des deux filles du couple.»
Au dernier étage du chalet, les chambres : «Il y avait, dans celle de Sarah, une des filles des Flactif, des traces – nettoyées et révélées par le BlueStar – de projection de sang sur les murs indiquant qu’un coup avait été porté toujours à une hauteur inférieure au mètre. L’ADN était celui de l’une des deux fillettes.»
Lors du procès des auteurs et complices de ce carnage, Philippe Esperança a été longuement questionné par le président des assises sur la version des faits donnée par David Hotyat, qui expliquait que deux mystérieux individus l’avaient frappé à l’intérieur du chalet et qu’il s’était évanoui.